Débordements

La maison contreplaquée. Bon marché.
Cadres superposés. A la ligne.
Éphémères – Inconsistants – Intranquilles.

Le souffle s’y pose sans voir
La pensée voltige sans croire

Jeu du hasard. La liberté.
Les couleurs débordent. Explosent.
Le trait tranche. Traque.

Tout est permis.
« Allons jouer » dit l’enfant ensommeillé.

La main tremble – l’œil s’enfuit – les traces restent.
S’y accrochent les lumières.
Les esprits.

Tout est permis.
« Dix … Neuf … Huit … » crie l’enfant caché.

Les coulures prennent la poudre d’escampette
Dévalent le long de la main
Les jaillissements noirs et jaunes rugissent enragés
Jusqu’alors contenus dans la matière première – dans la matrice singulière

Des résistances.
Incongrues – Reconnaissables.
Une flèche noire indiquant le sens – la direction – le bras tendu
Un cœur bleu posé sur une branche – une jambe – résolument rouge

Le tableau prend corps.
Le temps fera le reste.

Il restera l’oeuvre des multiples.

 

Ecrit le 1er juillet 2017
Droits réservés © 1001 petits pois

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Grand écart

L’écart prend corps
L’arbre rend l’âme
Le corps prend sens
L’âme à contresens

Souvent d’un point sans lieu
Une branche sortie du corps
A la cime

Souvent d’un point sans lieu
Un bras sorti de l’arbre
En racine

Me sera-t-il donné
De planter l’arbre à l’ombre de ma vie ?
Me sera-t-il donné
De prendre corps à l’ombre de ma mort ?

L’alternance du lendemain au creux de la main
Je bascule
Je m’accroche à la terre vierge
Je m’absente du vide
Je vis.

 

Ecrit le 1er juillet 2017
Inspiré par Andrée Chedid, « L’écart » & « Prendre corps »
Droits réservés © 1001 petits pois

 

Souvent, j’habite mon corps

Souvent, j’habite mon corps.
Je rentre, j’allume la petite lumière posée sur le guéridon de ma trachée, mon ventre s’illumine progressivement.
Pour n’en rien dévoiler, je tire les rideaux de peau blanchie et je me carapace dans la chaleur de mon estomac.

Le nuit tombe, les tambours de mon crâne s’assoupissent, les trompettes de mon âme s’envolent vers d’autres destinées.
Et le chat, allongé au bord de mes doigts, surveille d’un œil entrouvert les remous du sang qui circule dans mes veines arides.

Le soleil ferme la porte. Épaule, genou, cheville craquent sur le plancher de mes nerfs engourdis. Je dévore d’un creux de rein la phrase interdite qui coule entre mes lèvres.
Et le chat, allongé à l’orée de mes pieds, dédaigne d’un regard mystère, les volutes de pensées qui bouillonnent de ma fragilité faite femme.

Souvent, j’habite mon corps.
J’en sors, je tranche un morceau de moi-même pour le permettre au regard de l’autre.
Mais de le toucher, j’envisage un esprit délabré qui fourmille mon souffle, mon odeur, ma caresse.
Et un chien, accroché à mes basques, avale goulûment l’air de rien.
Et un chien, accroché à ma prose, indique, protecteur, « attention, chien méchant ! »

Pourtant, j’habite mon corps.
A l’interstice.
Par intermittence.
De l’intérieur.

Il en reste parfois une bougie creuse, une flamme ténue, un bruissement d’Elle, un frémissement d’Il.

Pourtant, j’habite mon corps, mon cœur.

Ecrit le 1er juillet 2017
Incipit emprunté à Andrée Chedid dans « L’écart »
Droits réservés © 1001 petits pois