Souvent, j’habite mon corps

Souvent, j’habite mon corps.
Je rentre, j’allume la petite lumière posée sur le guéridon de ma trachée, mon ventre s’illumine progressivement.
Pour n’en rien dévoiler, je tire les rideaux de peau blanchie et je me carapace dans la chaleur de mon estomac.

Le nuit tombe, les tambours de mon crâne s’assoupissent, les trompettes de mon âme s’envolent vers d’autres destinées.
Et le chat, allongé au bord de mes doigts, surveille d’un œil entrouvert les remous du sang qui circule dans mes veines arides.

Le soleil ferme la porte. Épaule, genou, cheville craquent sur le plancher de mes nerfs engourdis. Je dévore d’un creux de rein la phrase interdite qui coule entre mes lèvres.
Et le chat, allongé à l’orée de mes pieds, dédaigne d’un regard mystère, les volutes de pensées qui bouillonnent de ma fragilité faite femme.

Souvent, j’habite mon corps.
J’en sors, je tranche un morceau de moi-même pour le permettre au regard de l’autre.
Mais de le toucher, j’envisage un esprit délabré qui fourmille mon souffle, mon odeur, ma caresse.
Et un chien, accroché à mes basques, avale goulûment l’air de rien.
Et un chien, accroché à ma prose, indique, protecteur, « attention, chien méchant ! »

Pourtant, j’habite mon corps.
A l’interstice.
Par intermittence.
De l’intérieur.

Il en reste parfois une bougie creuse, une flamme ténue, un bruissement d’Elle, un frémissement d’Il.

Pourtant, j’habite mon corps, mon cœur.

Ecrit le 1er juillet 2017
Incipit emprunté à Andrée Chedid dans « L’écart »
Droits réservés © 1001 petits pois

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